Dé-jeûner.
Le mot carnaval est composé de carne, viande, et de levare,
lever; il a d’abord servi à désigner " l’entrée
en carême ", puis " la veille de l’entrée
en carême ", caractérisée par des ripailles,
licences et divertissements. Le Carnaval constitue une suite
de festivités mettant en scène le corps et son
rapport au monde dans ses dimensions triviales, quotidiennes.
Il fait subir à ces rapports un passage symbolique au
rang d'objet de célébration ; ce qui est absorbé et
ce qu'il advient des aliments lors de la digestion, tout cela
acquiert pour un temps dans la sphère sociale un statut
autre, qui tient du culte (existence d'une " saint Cochon ",
fève comme symbole de royauté, crêpe comme
symbole de la lune...) Cloaca ou
les Mosaïques n'accomplissent-elles
pas d'une certaine façon un passage similaire de l'aliment
au symbole, du processus trivial de la digestion à un
objet socialement assumé ou du moins considéré tout
autrement ? Le fait que les aliments consommés lors du
carnaval lui sont spécifiques indique que ces aliments
sont signifiants: on mange beaucoup en Carnaval, mais on ne mange
pas n'importe quoi!.... La démarche de Wim Delvoye avec
Cloaca, qui n'ingurgite pas de la simple nourriture mais de la
cuisine, et même, à l’exposition de Lyon,
de la grande cuisine, a quelque chose de commun avec cette attention
portée au choix des aliments dans le carnaval.