LOUPOT Le Musée de l’imprimerie et de la communication graphique a présenté jusqu'au 28 août 2016 une exposition consacrée au grand affichiste français Charles Loupot (1892-1962).
Sous le commissariat de Thierry Devynck, conservateur à la Bibliothèque Forney et spécialiste de l’histoire de l’affiche française, l’exposition permet de redécouvrir l’affichiste, un temps associé de Cassandre. On peut regarder Charles Loupot comme l’un des inventeurs du style Arts déco, dont il ouvrit les portes de bronze à sa discipline. C’est le plus « artiste » de tous les affichistes, le plus charmeur, mais il fut aussi le plus graphique, surtout après la seconde guerre mondiale lorsque, homme mûr, il invente un art géométrique et rigoureux, aux confins de l’abstraction, art savant, moins immédiatement séducteur, mais toujours d’une grande efficacité publicitaire.
Quand d’autres affichistes à carrière longue (Chéret, Cappiello), présentent un œuvre très homogène (dit en termes moins aimables, ils sont un peu répétitifs), la carrière de Loupot évoque les métamorphoses de certains insectes. Elle s’étend sur cinquante années et connaît une série de périodes assez nettement différenciées, qui abordent en un large éventail et comme s’il s’agissait d’une démonstration d’école les divers moyens offerts à la communication publicitaire.
Thierry Devynck, ami de la famille de Charles Loupot, permet au Musée d’exposer des travaux qui n’ont pas encore été dévoilés et font de cette rétrospective un moment privilégié d’étude et d’admiration autour de l’art de l’affiche.
Charles Loupot, le plus « peintre » des affichistes
Né le 20 juillet 1892 à Nice, Charles Loupot s’inscrit en 1911 à L’École des beaux-arts de Lyon. Il y réalisera sa première affiche sur le bal des étudiants, dans un style très figuratif mais déjà très maîtrisé ; le Musée de l’imprimerie vient d’acquérir l’un des rares exemplaires restants de cette création de jeunesse.
L’affichiste est mobilisé pendant la grande Guerre, il est blessé. Installé chez ses parents à Lausanne, il rentre dans la vie professionnelle, ses premiers dessins sont publiés dans La feuille d’Avis de Lausanne.
À partir de 1918, les commandes se multiplient pour le jeune artiste, il s’oriente vers la création publicitaire et découvre les arcanes de l’imprimerie.
Voisin puis Nicolas et les Galeries Barbès
La production des jeunes années de Loupot s’inscrit dans le courant du graphisme suisse de l’époque, mais très vite l’artiste s’en échappe. Le trait un peu rigide des premières années s’efface devant la spontanéité. Les critiques voient en lui « un décorateur et un coloriste plein de ressources ».
En 1923, Loupot s’installe à Paris et travaille pour la maison Devambez, déjà éditeur de Cappiello, qui souhaite diversifier sa production d’affiches publicitaires. Loupot dessinera deux affiches pour les automobiles Voisin, elles marqueront son entrée remarquée dans le monde publicitaire.
Au sein de la petite structure Les belles affiches animée par André Aubespin, Loupot réalisera ses premières affiches pour Nicolas, les Galeries Barbès. Des créations réalisées en teasing pour les vins Nicolas, avec 3 affiches. 1927 et aussi le début de la collaboration avec Eugène Schueller, propriétaire de Valentine, Dop, Ambre solaire, Monsavon puis L’Oréal.
Saint Raphaël et tant d’autres
Après Les Belles affiches, vient le temps de L’alliance graphique, en association avec Cassandre. Les deux grands artistes on du mal à travailler ensemble ; leur association durera deux ans.
Un bref passage à L’alliance graphique précède une période plus productive : Loupot rencontre Max Augier, chef de la publicité de Saint Raphaël. « Je sentais devant moi un être exceptionnel et je ne me suis pas trompé » dira Augier de Loupot. La collaboration de Loupot avec Saint Raphaël, bien que freinée par des lois restrictives sur la publicité pour l’alcool, et ce jusqu’en 1950, permettra l’éclosion d’affiches spectaculaires.
À cette date, Loupot ouvre son agence, Les arcs. Les Galeries Barbès lui confient la décoration de ses camions, il travaille aussi pour Air France. Dans cette dernière partie de sa carrière ; Loupot se caractérise par un style moins spontané, plus « cérébral ». Les sigles d’Air liquide et de Route et Ville en témoignent.
« La peinture abstraite, c’est peut-être l’affiche de demain » aimait à dire Loupot, qui s’éteint en 1962 dans sa maison des Arcs, en Provence.