Ce qui m'intéresse dans la photographie, c'est le photoreportage et les deux axes de traitement qu'il propose. Celui de l'actualité chaude et de la commande, l'image du jour faite pour la presse du lendemain, et celui du reportage à long terme qui autorise le développement d'un sujet personnel, qui permet de raconter une histoire. Dans ma pratique photographique, 80% de mon travail est consacré à la production d'images chargées de chasser l'actualité précédente avant de disparaître à leur tour. Voyages pendulaires est mon troisième reportage à long terme, après un travail en Palestine et un second en Afrique consacré à la maladie du noma. Dans les deux cas, ce que je voulais, c'était montrer le quotidien des gens, ce qu'ils vivent, rendre compte aussi de la joie de vivre incroyable de ces enfants atteints du noma, considérés comme des êtres à part, cachés par leur famille, quand le traitement qui leur fait défaut permettrait de les soigner en quinze jours. C'était un sujet visuellement très dur, que j'ai choisi de traiter en noir et blanc, seul le magasine Photo l'a publié dans le numéro spécial consacré au festival Visa pour l'image, qui en organisait la projection. Je l'ai fait pour raconter cette maladie, dire qu'elle existe et qu'elle est chaque année responsable de la mort de 100 000 enfants, parce que j'en ai assez de ces sujets qu'on n'aborde jamais.
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