Le plan est appelé « plan scénographique » car il met en scène la ville de Lyon avec tous les édifices en perspective ; c’est un chef d’œuvre de vue cavalière qui restitue rues et maisons avec une exactitude qui en fait une « vue aérienne » avant la lettre ! Il figure la cité lyonnaise immeuble par immeuble et nous insère en quelque sorte dans la vie quotidienne de la Renaissance par de nombreux détails et des petites scènes animées. Il est également exceptionnel par ses dimensions pour l’époque : assemblé, il mesure 1,70m x 2,40m.
L’importance de ce document a toujours été reconnue, il a été utilisé reproduit et usé jusqu’au 18e siècle. Le fac-similé réalisé par la société de topographie historique de Lyon aux environs de 1875 en est une des reproductions les plus connues. Il porte les marques de ces usages bien que sa restauration très délicate en 1989 l’ait débarrassé d’une gangue de six couches d’ajouts et repeints successifs. Il est constitué de 25 planches d’une gravure à l’eau forte d’une très grande finesse, avec des rehauts de couleur, qui, assemblées, représentent l’ensemble de Lyon au milieu du 16e siècle. Il présente malheureusement des lacunes dans le dessin.
S'agissant d'un plan gravé, autrement dit le produit d'un procédé de reproduction mécanique, on devrait le regarder comme un exemplaire parmi d'autres. Pas plus, cependant, que l'original dessiné, aucun autre exemplaire ne nous est parvenu. Dans pareil cas, l'exemplaire unique prend la valeur que devrait avoir son prototype manuscrit disparu.
Ce plan, unique donc, est aussi le premier plan précis de la ville. Jusqu'au milieu du 16e siècle, en effet, les images de Lyon sont schématiques quand elles ne sont pas purement imaginaires.
Le plan n’est pas daté ni signé, deux cartouches restent désespérément vides ; on a pu établir que ce plan restitue l’image de la ville entre 1548 et 1553. Bien que nettement plus grand, il présente des similitudes dans sa réalisation avec le plan de Paris de 1550, conservé à l’université de Bâle. On ignore les circonstances et les hommes qui ont créé ce document unique mais sa grande taille, la complexité des opérations de levée du plan, la technique employée laissent à penser qu’il n’a pu être réalisé que pour un important personnage. Les armes royales suggèrent que la réalisation du plan est peut-être à l’initiative du roi de France : les trois croissants entrelacés figurent l’emblème commun de Henri II et Diane de Poitiers. Le croissant royal est également placé sur un édifice de construction récente, le jeu de paume d’Ainay et dans la main de l’ange porteur du cartouche « Lyon ».
Dans son cadre de fleuves et de collines, dont l’auteur a tenté naïvement de rendre le relief, Lyon est entourée et pénétrée de verdure. A l’intérieur de la ville, des dizaines de jardins ont leur arbre, et que de tonnelles, pavillons de verdure et espaliers ! Le paysage champêtre des abords contraste avec la sévérité du bâti des 4680 édifices représentés. La confrontation de ce document avec les registres d’imposition de l’époque « les nommées » montre que le nombre des maisons a été respecté par l’auteur du plan ; l’aspect des édifices est rendu avec soin et permet de se faire une idée des monuments détruits ou modifiés.
Le décor immobile s’anime de tout un monde d’animaux et d’humains et tout particulièrement les rives de la Saône. Des chevaux, des chiens, un héron au bord du Rhône, des mules et des bœufs, cochons, moutons, chèvres, lapins et même un lion indifférent, le bestiaire est très riche ! Des hommes, quelques femmes et des enfants vaquent à leurs occupations. Les moulins-bateaux du Rhône et les autres navires occupent en bonne place les premiers plans de la perspective. De nombreuses scénettes amusantes égayent la représentation et dans ce domaine le réalisme du plan va bien au-delà du trait. Pour autant, la représentation de l’espace urbain dans le plan scénographique n’échappe pas à l’imaginaire des Lyonnais de la Renaissance.
Dans le souci d’une bonne conservation, le plan est actuellement conservé en feuilles, sans avoir été remonté comme il était visible à l’époque. La numérisation permet maintenant de reconstituer virtuellement l’original tel qu’il se présentait. Le plan est visible sur le site internet des archives.